[Complément au "Seul Ouvrage"] - Le temps de l'Aca

Diverses Anecdotes et contes de Batailles de mes années à l'Académie d'Ascalon.

Récit de bataille :

Ascalon – Nord ouest du Sanctuaire de Pikken – 13 jour de la saison du Phénix.


L’air était lourd.
La colonne attendait patiemment, un impressionnant guerrier en tête. Je voyais dans le regard de mon voisin Romur une pointe de peur. Je l’ai pris par l’épaule et tenté de le rassurer. Après tout c’est mon rôle non ? Même le capitaine Khaler l’ignore mais je suis le plus âgé ici.
L’air était encore plus lourd d’angoisse.
Même mon camarade Thaoth l’ignore. Ce guerrier à qui j’ai sauvé la vie il y a une poignées de mois marche devant, en première ligne. Il s’est porté volontaire pour aller là, derrière le capitaine. Il marchait droit et n’était visiblement guère angoissé, ou faisait il des efforts pour ne pas le faire paraître.
Soudain, Khaler fit chanter ses lourdes épaulettes d’acier en levant son bras armé. Halte.
Une pose ? Une inquiétude ? Un combat ? Une embuscade ? Tout le monde se regarda et jeta un œil aux alentours.
Un grognement sourd. Une vague de frissons dans notre troupe. Les Charrs sont là.
Vite, Arnar, mon vieux maître dorénavant gradé dans l’archerie d’Ascalon, m’entraîna avec une paire d’archers sur une colline un peu en arrière, sur le coté. Je jetais un dernier regard de sympathie à Romur et… au dos de Thaoth, obsédé par la bataille.
En arrivant sur la hauteur, j’ai débord vu le regard sombre de Arnar. Après avoir observé dans sa direction, le mien aussi s’assombris. A quelques centaines de mètres arrivait un très grand bataillon de guerriers charrs. Trop grand.
Devant notre capitaine se dressait le chef de ce bataillon. Une bête immense. Il attendait en se léchant les babines le reste de sa horde.

Khaler se tourna vers ses soldats pour les encourager.
« Enfants d’Ascalon ! hurla t-il, Mais que font ces chiens sur votre Territoire ? Allons nous laisser ces pitoyables créatures piétiner notre patrie ? »
La foule hurla pour lui répondre avant qu’il reprenne.
« Vous leur ferez face ! Vous les mettrez à terre ! Vous les ferez trembler de peur en soutenant leurs regards idiots ! »
L’adrénaline montait petit à petit dans le cœur de tous. Maintenant, ils criaient après chaque exclamation. Derrière, l’armée Charr était prête à festoyer. Notre capitaine se retourna.
« En avant !! A la bataille !! La victoire ou la mort !!! POUR ASCALON !!! »
Tous se ruèrent alors. Je voyais le marteau de Thaoth se brandir aux cotés du capitaine, et je priais pour qu’ils s’en sortent.

Et la bataille commença.

Maître Arnar décocha la première flèche, qui lacéra la gorge du chef Charr. La mienne lui creva un œil, les autres lui transpercèrent les membres.
La bête ainsi transpercée se lança sur Thaoth. Je l’entendis crier depuis mon promontoire. Il avait fracassé le crane du monstre après que Khaler lui ai ouvert le ventre d’un coup rapide.
Arnar donna l’ordre de feu a volonté, et nous primes chacun une cible.
La bataille souleva tellement de poussière et fit tellement de bruits que je ne distinguait plus mes camarades. Seul le Capitaine restait visible, avec son armure Rouge et Or. Il était seul, avancé dans la Horde ennemie, broyant du bouclier et déchiquetant de l’épée.
Hélas nos soldats de première ligne n’avait pas pu, pour la plupart, encaisser l’assaut des lourdes bêtes. Et déjà, toute la troupe était engagée.

Soudain, une gerbe de sang me gifla le visage. L’archer derrière moi venait de se faire décapiter par un Charr guerrier-lame. Son voisin se fit broyer le bras, et le troisième servit de repas frugal. Arnar couru. Je me retrouvais seul devant ce tas de muscles poilu. J’y jeta mon arc à la tête, avec mon carquois. Cette pitoyable diversion me fit gagner la seconde nécessaire pour dégainer mon épée.
« Par le sang d’Adelbern ! »
Je criais une de ces phrases qui avait le pouvoir de faire cracher des flammes à ma lame, jusqu’alors éteinte dans son fourreau.
Le Charr, qui faisait deux fois ma taille, recula. L’épée du dragon Incendiaire, cette épée de chef Ascalonnien, seul lègue de mon père, avait –et c’était bien la seule chose en ce monde- le pouvoir de faire peur aux Charrs, entre autres.
Ou du moins un instant.
Cet instant qui suffit à Maître Arnar pour faire passer l’envie de continuer son massacre au démon, d’une flèche bien placée.
Bien que rassuré par ma lame, mon cœur battu bien vite à ce moment. Je suis resté un petit moment à regarder la dépouille. Un cri me tira de ma courte torpeur.
« Vooouus ! Vous les tiendrez !! Pour votre roi !!! »
Ce fut les derniers mots de notre cher Capitaine. Je vis l’éclat de sa lame tournoyer une dernière fois, les reflets de son armure se réduirent et il tomba à terre.

Je devinais alors le message qui passait dans la tête de tous. Nous avons perdu, le meilleur à succombé. Au secours, nous allons mourir.
C’est à ce moment que je vis Thaoth se dresser sur le cadavre de Khaler, et hurler au ciel en brandissant son mortel outil. Il l’abattit avec une violence inouïe sur tous les Charrs qui osaient s’approcher. Il était dans une folie meurtrière dévastatrice. Ses frères d’armes les rejoignirent peut à peu, et c’est un véritable cercle qui s’était bientôt formé au centre du champ. Aucun camarade ne tomba plus. Ils avaient tous retrouver foie et courage, ils avaient tous la rage de survivre, ils avaient tous décidé que Thaoth était le nouveau capitaine.

Je restais là, dans le vent chargé de mort, mon épée serré dans ma main, à contempler notre victoire.